Après une première césarienne, certaines femmes enceintes peuvent appréhender l’accouchement par voie basse. Il est pourtant tout à fait possible et même recommandé par les gynécologues obstétriciens. Dans quelles situations l’accouchement vaginal après césarienne (AVAC) peut-il être envisagé ? Comporte-t-il des risques pour la santé de la mère et de l’enfant ? Quels sont les facteurs qui peuvent diminuer son taux de succès ? On fait le point avec le Dr Yannick Malard, gynécologue obstétricien.
En France, le taux de césarienne est de 20 %. Parmi les femmes enceintes qui ont déjà eu une césarienne, plus de la moitié (51 %) d’entre elles accouchent par césarienne programmée. Parmi celles qui débutent un travail (travail spontané et non déclenché), 75 % accouchent par voie vaginale. “Au total, 36,5 % des femmes ayant déjà subi une césarienne accouchent par voie vaginale”, fait savoir le Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF). Ces chiffres montrent bien qu’une première césarienne ne conduit pas forcément à une césarienne pour le ou les prochains accouchements.
Quels sont les risques d’un AVAC ?
Même s’il est recommandé par les gynécologues obstétriciens, l’accouchement par voie vaginale après césarienne comporte des risques, mais ils sont rares :
- La rupture utérine. Pendant la césarienne, l’utérus est ouvert puis refermé une fois le bébé sorti. Il est donc marqué par une cicatrice susceptible de se rompre au prochain accouchement sous l’effet des contractions pendant le travail, et de provoquer une hémorragie. Ce risque est estimé entre 0,1 et 0,5 % chez les femmes avec antécédent de césarienne, il est donc très faible. “Je n’ai été confronté à ce cas de figure qu’une seule fois en 20 ans de carrière“, souligne le Dr Malard. Le risque de rupture utérine augmente avec la réduction de l’intervalle de temps écoulé entre l’accouchement par césarienne et la date de conception de la grossesse suivante.
- L’insertion placentaire anormale ( placenta prævia et accreta). Le risque augmente avec le nombre de cicatrices.
- La survenue d’une plaie opératoire, principalement de la vessie. Le risque est estimé à moins de 1 %.
- Le décès de la mère. Le risque augmente si la tentative de voie basse après césarienne (TVBAC) est un échec mais diminue avec le succès d’une TVBAC précédente.
- Le décès du bébé. Le risque est plus important en cas de tentative par voie basse après césarienne que pendant une césarienne programmée après un antécédent de césarienne. Mais il reste faible : 0,5 à 2,3 cas pour 1000 naissances.
- L’ encéphalopathie anoxo-ischémique (quand le bébé a manqué d’oxygène pendant l’accouchement). Là encore, le risque est faible : 0,8 pour 1000 naissances.
Les facteurs de réussite d’un AVAC
Trois facteurs favorisent la réussite d’un accouchement par voie vaginale après césarienne :
- Avoir déjà accouché par voie basse ;
- Avoir un score de Bishop favorable ou un col considéré comme favorable à l’entrée en salle de travail ;
- Le travail spontané (quand l’accouchement se déclenche de lui-même).
Les facteurs qui diminuent le taux de succès d’un AVAC
Certains facteurs peuvent compromettre la réussite de l’accouchement par voie basse après une césarienne, mais ne l’empêchent pas pour autant :
- Avoir déjà subi une césarienne pour non-progression du travail ou non descente de la présentation fœtale à dilatation complète du col de l’utérus ;
- Avoir déjà subi deux césariennes, “bien que le taux de succès d’une tentative de voie basse après césarienne reste élevé, soit 70 %“, tempère le CNGOF ;
- L’âge maternel. “Passé 40 ans, les chances de réussite d’accouchement par voie basse diminuent“, indique le Dr Malard ;
- L’ obésité. Quand l’Indice de masse corporelle ( IMC) de la maman est supérieur à 30, l’accouchement par voie vaginale est plus risqué ;
- Accoucher d’un bébé dont le poids de naissance est estimé à plus de 4 kg.
En revanche, une césarienne programmée après un accouchement par césarienne (CPAC) est recommandée :
- quand le terme est dépassé et que le déclenchement est impossible à cause d’un col non favorable ;
- Quand la patiente a déjà subi trois césariennes (en excluant, s’il y en a eu, la ou les césariennes au motif d’une mort fœtale ou d’ une interruption médicale de grossesse).
Une surveillance accrue pendant l’accouchement
Le CNGOF recommande “la présence d’un gynécologue obstétricien pendant la tentative d’accouchement vaginal après césarienne lorsque le contexte obstétrical fait évoquer un risque plus élevé d’échec ou de rupture utérine tel qu’un déclenchement, des anomalies du rythme cardiaque fœtal ou de non-progression du travail“.
Pendant le travail, la parturiente est surveillée par un monitoring qu’elle doit garder en permanence. “A savoir qu’en cas d’accouchement par voie basse sans antécédent de césarienne, la patiente peut retirer le monitoring de temps en temps si elle souhaite se déplacer ou utiliser le ballon de grossesse pour soulager les douleurs ou favoriser la descente du bébé dans le bassin“, fait savoir le Dr Malard.
Le suivi de la grossesse est le même que pour les patientes qui n’ont pas d’antécédent de césarienne. “Il n’y a pas plus de consultations, en revanche, il est préférable que le suivi soit assuré par un gynécologue obstétricien plutôt que par une sage-femme“, estime le spécialiste. Enfin, la décision de voie d’accouchement est validée par un obstétricien au cours du 8ème mois. Mais le jour de l’accouchement, il est recommandé que l’obstétricien de garde soit systématiquement contacté en début de travail pour l’informer de l’évaluation du contexte obstétrical de la patiente et valider le choix de la tentative d’accouchement par voie naturelle.
Annabelle Iglesias
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